Les couleurs éclatantes des bateaux dans le ciel grisé, les allers et venues des hommes en jaune, l’odeur de mer, les récits des anciens…
Les couleurs éclatantes des bateaux dans le ciel grisé, les allers et venues des hommes en jaune, l’odeur de mer, les récits des anciens…
La pêche à la Coquille Saint-Jacques a ré-ouvert il y a peu, et je sais qu’assister au débarquement est un immanquable pour quiconque qui est du cru. En allant au marché un lundi matin sur le port, j’ai entendu le poissonnier dire qu’il y avait un débarquement aujourd’hui, à 15h30. J’y serai !
J’arrive sur le quai de la Pierre Alien et m’approche doucement, ne voulant pas déranger les hommes au travail. Un bateau vient de terminer de débarquer, pas de nouveau navire à l’horizon. L’agitation a quitté le quai pour s’engouffrer dans la criée. Je vais attendre le prochain. Le vent souffle un peu aujourd’hui et les nuages ne laissent pas de place au soleil. Les mouettes tournent au-dessus de ma tête, en attente de leur festin. Toujours rien. L’odeur du port et de la mer me chatouille les narines. Je commence à bougonner, mais les autres curieux autour de moi me laissent à penser que je ne suis pas venue pour rien : il y a les vieux loups de mer, qui serrent des mains à droite à gauche, les grands-parents qui retiennent par la capuche leurs petits-enfants excités, quelques touristes qui, comme moi, ont l’air de se sentir tel un cheveu sur la soupe. Encore 5 minutes et je m’en v…
– Papi, en voilà un ! trépigne un petit garçon
Il arrive, fendant l’eau lisse du port calme. Le jaune et le vert de sa coque illuminent le gris du ciel. Le premier chalut entre dans le port. Les hommes autour de nous commencent à s’affairer, avec les autres badauds nous nous collons près des barrières pour ne pas gêner les manœuvres, ce qui a le mérite de nous placer aux premières loges. Et en voilà d’autres maintenant ! Le Bruant, l’Odyssée, le Baradoz, l’Amphitrite, le Discovery… ils sont tous là, le pont chargé de sacs de coquilles Saint-Jacques.
Les trois premiers bateaux accostent au ponton, les autres attendent patiemment leur tour. Le ballet des transpalettes peut commencer. Les matelots donnent leurs derniers efforts, et déchargent les sacs remplis de coquilles dans la bonne humeur. Je profite des explications du grand-père à son petit-fils : aujourd’hui, les pêcheurs sont partis 5h en mer, ils peuvent ramener jusqu’à 1.1 tonnes de Coquilles Saint-Jacques ! Mais attention, seulement celles qui sont assez grosses, les plus petites sont rejetées à la mer pour avoir le temps de se reproduire. Le tri est fait à la main par les pêcheurs, aucune ne doit être plus petite que 10.2cm ! Mais quand le gisement principal sera ouvert, ils n’auront plus que 45min pour pêcher, pas une minute de plus ! Ils sont même surveillés par hélicoptère. Je savais que la pêche à la Coquille était réglementée, mais à ce point…
– Mais ils les pêchent avec quoi ?
Pas avec des cannes à pêche mon p’tit ! Avec des dragues, c’est un genre de gros filet en métal très épais qui racle le fond marin.
Les matelots garnissent le monte-charge, et les employés de la criée réceptionnent la cargaison à côté de nous. Le tout est mis sur transpalettes et emporté à l’intérieur de la criée. Le Baradoz a fini de débarquer, au suivant ! Le ballet peut continuer pendant une bonne heure… Les coquillers aux couleurs chatoyantes défilent sous mes yeux, les hommes en jaune s’affairent autour de moi… Je suis au cœur d’une frénésie, sans en faire partie.
La vente aura lieu dans 2h, mais elle sera réservée aux professionnels, je devrais attendre demain pour les retrouver sur les étals des poissonniers. Comment vais-je la sublimer ? En brochettes ? En carpaccio ? Oh et puis non, toutes simples, juste poêlées dans du beurre et nacrées à cœur, c’est le meilleur. J’entends Papi rappeler au petit garçon que la pêche à la coquille, c’est dur, parfois dangereux et qu’il faut être fier de nos pêcheurs. C’est aussi pour ça que la Saint-Jacques est précieuse.
J’ai trouvé ce que je suis venue chercher : du typique, de l’authentique, du breton, de la couleur, de l’odeur, des gens, une histoire, des histoires… Et un sacré appétit !
Fraîchement débarquée en Bretagne, j’ai soif de découvrir mon nouveau terrain de jeu et de partager mes découvertes. Vous m’accompagnez ?
J’aime : les nuances de bleus et de verts dans notre belle mer, la sensation du sable entre les doigts de pieds, l’odeur des crêpes dans une poêle bien chaude, TOUTES les recettes de Coquilles Saint-Jacques (surtout celles de Mamie ! )